Austin le 23 Octobre 1999.
Cher Tin,
Je suis Quan Minh Giau, ancien Colonel de l'ARVN, et voudrais offrir quelques lignes de pensées au sujet du Général Nguyen Van Hieu, un camarade de classe que j'ai connu, aimé et respecté. J'ai connu le Général Hieu pour avoir vécu pendant un certain temps avec lui dans la même brigade à l'Académie Militaire de Dalat et plus tard pour avoir travaillé avec lui dans le 3ème Bureau de l'Etat Major Général.
Parmi les cadets, Hieu était plutôt taciturne, affable et jovial, jamais vulgaire et querelleur. Toutes ses actions, même les plus insignifiantes, avaient un revêt de perfection. J'avais l'impression qu'au dessous de sa taciturnité avec son affabilité et un air professoral gît une âme forte et résolue, qui se dirigeait vers un idéal élevé.
Si les actions insignifiantes révèlent à un certain degré le caractère d'un individu, alors je me rappelle encore quelques anecdotes parmi les myriades comportements de Hieu pendant la période d'entraînement. Fréquemment, en fins de semaine, se déroulaient les inspections des quartiers, uniformes, équipements, armes de chaque cadet. L'officier d'inspection était le Capitaine De Taine, commandant de la Division des cadets. Dans une inspection, la paire de bottes de Hieu a été employée par le Capitaine De Taine comme le modèle du polissage de bottes. En réalité, une paire de bottes de n'importe quel cadet a été polie complètement à la surface supérieure, mais si la semelle était examinée de près, la majorité contenait des traces de poussières aux alentours des clous. Mais la paire de bottes de Hieu était scintillante de haut en bas!
Pendant l'inspection, les commandants de l'Académie faisaient également attention à la propreté aux alentours des dortoirs et en particulier aux alentours des toilettes. Quand venait le tour de l'équipe de Hieu d'être en charge, je notais que Hieu se portait volontaire à assumer le boulot le plus dur, celui de nettoyer le parquet en ciment en utilisant une immense serpillière attachée à une canne à la forme de T. Tout d'abord verser l'eau, ensuite essuyer et brosser, finalement sécher. Avant le temps d'inspection, si quelqu'un entrait pour laver ses mains et répandait de l'eau sur le parquet, Hieu essuierait sans dire un mot.
Envers les amis occasionnels ou intimes, Hieu se montrait également affable et patient. Une fin de semaine, nous étions permis de sortir du camp militaire. Hieu m'invitait à aller visiter la plantation de thé d'Entreray par motobicyclette louée dans le centre de la ville de Dalat. En toute honnêteté, je ne savais pas monter une motobicyclette; j'avais essayé une fois et m'étais tombé misérablement, mais quand Hieu m'invitait et promettait de m'enseigner, j'avais envie d'aller. Ainsi, nous louons chacun une motobicyclette, mettons en marche les moteurs, et Hieu m'enseigne à changer de vitesses, à appuyer sur l'accélérateur, etc... et il roule lentement devant de moi, je roule derrière lui! En chemin, quand nous engageons sur certaines routes montantes, je tue le moteur à plusieurs reprises! Hieu se ralentit et me signale quand je dois changer de vitesse, à la 2ème, à la 3ème, et quand je dois reverser à la 1ère. C'était bien laborieux, mais enfin nous sommes arrivés à notre destination et sommes revenus sain et sauf. Pendant notre trajet, Hieu s'est montré jovial et patient, il ne dénote aucune plainte ou impatience au sujet de ma maladresse.
Le temps passait vite, le jour de la sortie de l'école, les nouveaux officiers diplômés s'éparpillaient dans tous les coins du pays, j'ai retenu l'image de quelques amis spéciaux dans ma mémoire, et parmi eux Hieu occupait un coin bien spécial.
Après le découpage du pays en deux morceaux, je suis transféré au 3ème Bureau de l'Etat Major Général, responsable de la section de Recherche Générale; pas longtemps après, Hieu est aussi transféré ici en tant que Chef Adjoint. Je suis très content de notre réunion. La première chose que je dénote est qu'il demeure le même dans son comportement et attitude, comme d'antan. Pendant la période que nous travaillons au 3ème Bureau, je remarque que Hieu est très intelligent et diligent, vif et rapide en prenant des décisions concernant les affaires stratégiques. Tout le monde du personnel le respecte. Parfois aux pauses de midi, il s'arrête par mon bureau ou j'entre dans son bureau pour parler de la famille, société, opérations militaires...Un jour, il me dit: "Je fais tout mon possible pour me rapprocher d'un saint, mais je n'y parviens pas". Depuis les jours à l'Académie Militaire de Dalat, j'ai noté que Hieu était un homme d'idéal, ce jour-là j'ai compris que son idéal se situe dans la stratosphère spirituelle, visant à la perfection spirituelle dans la vie afin d'être près de Dieu. Un tel idéal est la motivation de toutes ses actions.
Après son service au 3ème Bureau/EMG, Hieu a été transféré à un autre poste. Je n'entendais pas parler de lui jusqu'au temps où j'ai appris qu'il était devenu Commandant d'une Division. La dernière fois où j'avais l'occasion de rencontrer le Général Hieu était quand il passait par l'Etat Major Général pour quelques affaires.
Puis à l'étonnement de tout le monde, Hieu est parti subitement pour de bon. J'ai été présent à son enterrement au cimetière militaire, dans ma tête tourbillonnaient une multitude d'interrogations au sujet de son départ inattendu , même aujourd'hui je n'ai pas encore trouvé de réponses satisfaisantes. Mais je suis certain d'une chose: Hieu est avec Dieu, celui qu'il avait toujours aspiré d'être près par une vie visée à une parfaite sainteté et un bonheur infini réservé à tous ceux qui ont de la bonne volonté de répondre à l'appel du Sauveur. Là où Hieu vit à présent, je suis certain qu'il continue à intercéder pour ses bien-aimés et il n'oublierait également pas ses camarades de classe qui avaient le même idéal de servir leur pays bien-aimé.
Quan Minh Giau