L'Evacuation De La Famille Du Général Hieu L'enterrement du Général Hieu a eu lieu le 12 avril 1975. M. Richard Peters, le Consul américain à Bien Hoa, a invité la famille du Général Hieu à une réception intime à sa résidence après les funérailles Je me rappelle que notre père, Tin, et moi-même avons accompagné Chi Hieu (belle soeur Hieu) et ses enfants à la résidence du Consul. Pendant la réception, le Consul a demandé à Chi Hieu ce qu'il pouvait faire pour la famille. En cette occasion; je jouais le rôle d'interprète entre ma belle-soeur et le Consul. Ma belle-soeur avait une faveur à lui demander: pourrait-il aider ses deux garçons plus âgés à obtenir le visa pour aller étudier aux Etats-Unis. Le Consul répond qu'il n'y a "pas assez de temps" pour cette démarche. J'ai immédiatement compris "le message". Ainsi, après avoir traduit la réponse du Consul, j'ai immédiatement suggéré à ma belle-soeur de demander s'il voudrait aider toute la famille à implanter aux Etats-Unis. Ma belle-soeur fut surprise par ma suggestion car le Consul venait de dire qu'il ne peut même pas aider deux personnes, et se demandit comment il pourrait aider toute la famille...? Mais sur mon insistance, elle accepta de répèter ma suggestion. Je "traduisis" sa demande au Consul. Nous étions heureusement surpris d'entendre sa réponse positive: "bien certainement". Il se tourna à son assistant vietnamien et lui ordonna de demander au Consul Adjoint de s'occuper de cette affaire. Après quoi, il me dit: Il ferait son possible pour évacuer toute la famille du général Hieu; cependant, il y aurait quelque difficulté à évacuer Dung, Cam, et Liem qui étaient à l'âge de mobilisation militaire. Il me donna le nom et le numéro de téléphone de son adjoint et m'a suggéré de le contacter pour d'autres détails logistiques. À la suite de plusieurs vaines tentatives pour contacter le Consul Adjoint par téléphone, le Consul américain me donna l'adresse de son domicile privé et m'encouragea à aller le voir. Ainsi quelques jours plus tard, Chi Hieu et moi sommes allé le chercher à cette adresse. Par chance, nous avons pu le voir juste à son retour de son bureau. Il nous a demandé de lui fournir une liste nominative de quatorze personnes -au maximum- à évacuer. De retour à la maison, nous avons commencé rapidement la sélection des noms pour cette liste. Le lendemain, cette liste était entre les mains du consul-adjoint. Quelques jours plus tard, je reçus un coup de téléphone du consul adjoint disant que nous devions être prêts le 29 avril à aller à une station d'autobus appartenant au Bureau D'Attaché de la Défense (DAO) et qui se situe à quelque part dans Saigon. Un autobus nous amènerait à l'aéroport de Tan Son Nhut. Malheureusement, le 28 avril 1975, l'aéroport de Tan Son Nhut fut bombardé. Ce matin-là, je reçus un coup de téléphone du centre d'opération du DAO, nous signalant que tous les vols étaient annulés. Cet après-midi là, encore un autre coup de fil de ce même centre nous fit savoir que des hélicoptères de Marines arriveraient le jour suivant pour remplacer les avions manquants et amener le reste des évacués. Nous devions être prêts pour ce plan de secours. Tôt le matin du 29 avril, un autre coup de téléphone nous informa que l'autobus du DAO ne serait pas disponible, et que nous devions nous débrouiller nous-mêmes pour aller au centre tôt dans l'après-midi. Vers midi, j'appelais le centre d'opération du DAO et demandai à parler au Colonel Legro, le Chef américain du centre. Un officier vietnamien (qui ne qui ne s'est pas identifiié pendant toute la durée de la conversation m'annonça que le Colonel était en train de prendre son déjeuner et me demanda s'il pouvait m'aider. Je me présentai moi-même comme le porte-parole de la famille du Général Hieu et lui demandai de prévenir les Marines de garde de nous laisser entrer à notre arrivée. Il me dit de ne pas nous inquiéter et de venir sur le champ. Une fois à l'entrée, je n'aurais qu'à demander aux Marines d'appeler le centre d'opération. Ainsi, nous avons quitté le quartier des officiers Chi Hoa dans deux voitures. J'étais dans la première avec Chi Hieu. Tin dans la seconde. Cependant, à notre arrivée à Tan Son Nhut, nous n'avons pa pu approcher l'entrée du DAO. Nous étions obligés de garer nos voitures à 200 mètres de là. Je me suis vêtu en soutane ce jour là. A mon pproche de la porte, les Marines en faction pointent leurs fusils M-16 vers ma direction et ne me permettent pas d'approcher à moins de 50 mètres. Dès lors nous nous tenions au dehors du DAO et attendions près de la barrière. Pendant ce temps, les Marines débarquèrent des hélicoptères et prennent position à l'intérieur de la barrière et pointaient leurs fusils vers l'extérieur. J'ai pu remettre un bout de papier portant le nom du Colonel Chef de centre à l'un des Marines à travers la barrière en lui demandant de bien vouloir contacter ce Colonel pour nous. La réponse est négative. Je me suis rendu compte plus tard que j'avais mal épelé son nom. A partir de là nous attendions là environ une heure. Plusieurs roquettes explosèrent autour de notre emplacement. Parce qu'il est impossible de contacter le Colonel américain, nous décidâmes de retourner chez nous à Chi Hoa. Malheureusement, les soldats vietnamiens en faction à l'entrée de Chi Hoa ne nous laissent pas entrer sous prétexte que nous n'avons pas confiance en eux en voulant partir aux Etats-Unis. Alors pourquoi revenir? Chi Hieu a la présence d'esprit de dire que nous sommes seulement allés visiter le tombeau du Général Hieu. Juste à ce moment-là, Dong, l'un des chauffeurs du Général, passe par là, dans une jeep civile appartenant au Général Hieu. Il s'arrête et dit aux soldats qu'ils n'ont qu'à ouvrir le coffre de la voiture pour trouver la preuve que nous avions l'intention de quitter le pays. Heureusement, nous n'avons pas pu ouvrir le coffre de la première voiture quand nous étions partis à midi, et avons dû mettre tous nos bagages dans la deuxième. Les gardes et le chauffeur (infidèle) du Général sont surpris de ne trouver que la plaque aux deux étoiles de général dans le coffre. Ne trouvant aucune preuve de notre culpabilité, ils nous laissent finalement entrer. De retour à la maison, nous découvrîmes que les gens se sont déjà branché sur notre ligne téléphonique et déjà utilisée comme si elle leur appartenait. Face à cette situation, je dis à tout le monde que nous devrions quitter cette maison et trouver un autre endroit. Tin m'encourage d'appeler de nouveau le centre d'opération DAO. Ainsi je compose le numéro de ce centre une fois de plus. Suis-je content d'entendre la voix du Colonel américain lui-même à l'autre côté de l'appareil! Je lui raconte ce qui s'était passé plus tôt cet après-midi. Apparemment, il connaît bien le Général Hieu parce qu'il me dit de ramener illico toute la famille au centre et donna tout de suite son instruction aux Marines de garde. Mais pour parer à toute éventualité, je lui fournis les numéros d'immatriculations des deux voitures et la description détaillée de celles-ci. À notre arrivée à Tan Son Nhut, un groupe de parachutistes vietnamiens fait stopper toutes les voitures. L'un d'eux approcha la mienne et fit une quête de l'argent pour son Colonel. Je lui dis qu'étant religieux je n'ai pas d'argent à lui donner. Chi Hieu dit qu'elle n'a que deux ou trois milles piastres. Il nous laissa seuls et est allé en rendre compte à son Colonel. Ils ne veulaient pas nous laisser passer. Je dis au chauffeur de rester sur place et d'attendre. Heureusement, quand les parachutistes ont réussi à ramasser assez d'argent, ils sautent dans leurs deux jeeps et se dirigèrent vers la porte d'entrée du DAO. Ainsi nous les suivons sur le fil. Environ une dizaine de voitures de l'ONU avec le drapeau bleu marine nous précèdaient. A l'approche de l'entrée du DAO, nous vîmes que les deux jeeps des parachutistes vietnamiens furent obligées de rebrousser le chemin sous la menace des Marines américains. Ce qui causa quelque appréhension parmi nous. Comme les voitures de l'ONU entrent une par une, la tension est grande. Après que la dernière voiture de l'ONU est passée, l'un des Marines regarda attentivement nos plaques d'immatriculation en vérifiant avec un morceau de papier dans sa main. Puis il nous fait signe d'entrer. Tout le monde exhalait un soupir de soulagement. Une fois à l'intérieur, nous amassâmes nos petits sacs du coffre et renvoyâmes les chauffeurs avecc les deux voitures à la maison. A environ 8 heures du soir, nous embarquâmes dans l'un des hélicoptères des Marines qui nous déposa sur l'un des bateaux de la marine américaine. Une demi-heure plus tard, nous étions transférés à un cargo. Nous naviguions environ cinq jours et débarquâmes à Guam. Pendant notre séjour à Guam, le Général de Brigade Tho vint voir Chi Hieu et seulement à ce moment-là qu'il s'identifia comme étant l'officier qui m'a parlé du centre d'opération du DAO. Un capitaine de l'armée de l'air américaine, à qui j'ai pu parler, écoute ma pétition pour un rapide arrangement qui nous permettrait d'aller aux Etats-Unis, et nous plaça au plus vite sur un vol disponible. Ainsi à la deuxième semaine du mois de juin, nous nous envolâmes à Indiantown Gap, PA, près de Harrisburg. A mi-juin, nous arriv$mes à Philadelphia, sous le patronage des Frères des Ecoles Chrétiennes... Nguyen Van Tri
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