(Le lecteur est averti que cet article est pris d'une presse de propagande Viet Cong. NVT)

Amiraux et Chefs de Province

Amiraux

Au Centre de Ré-éducation des Généraux de l'Armée fantoche, il y a un prisonnier lourdeau de 55 ans dont le teint témoigne d'une jeunesse bien préservée. C'est Tran Van Chon, l'ancien chef de l'Amirauté de Saïgon, qui se distingue de ses compagnons en prenant les repas tout seul, sous prétexte de suivre un régime spécial pendant cinq ans, en se conformant aux préceptes de Bouddha. Il dit qu'il est un passionné lecteur du Livre de Prières et autres oeuvres sacrés bouddhiques qui "tourneraient son esprit vers le sublime", pour "trouver le nirvana dans l'âme". Cependant, les officiers fantoches des autres services militaires plaisantent: "Eh bien, toute une vie dans un monastère ne serait pas suffisante pour réparer les méfaits dans la Marine.

"La Marine de Saïgon a fourni des possibilités illimitées de s'enrichir en un temps record. Les Amiraux et vice-amiraux tels que Tran Van Chon, Chung Tan Cang, Lam Nguon Tanh et autres - l'Amirauté comptait neuf en tout - étaient sans exception des multi-millionnaires, en dollars américains. Ils se sont enrichis "à la vitesse des torpilles," pour utiliser leur langage pittoresque.

Quand Tran Van Chon commence sa carrière, la Marine fantoche est sous la commande française et n'a seulement que huit navires. Vingt-trois années plus tard, elle commande une flotte de 1 000 navires, 100 desquels sont des vaisseaux à long court. La croissance de la flotte de Saïgon entraîne une augmentation prodigieuse de fortunes des officiers navals. Par contraste des chefs militaires de l'armée qui se trouvent confiner chacun dans un domaine donné, ils peuvent étendre leur champ d'action à toutes les côtes du Sud et même aux pays étrangers.

Leurs fortunes ont été données une croissance énorme quand les Américains commencent à livrer les navires dans le cadre de la "Vietnamisation" de la guerre. Les voyages à Guam, les Philippines, Okinawa, Hong Kong, et même à Washington ou New York pour l'accueil des navires américains, pour les périodes de probation à bord des navires américains ou aux quais navals américains, peuvent durer un ou deux jours, un mois, parfois jusqu'à trois mois, et même six mois. Ce sont des occasions excellentes pour les officiers hauts placés de s'adonner à des achats à bon gré et de se permettre dans des conjectures d'échange monétaire, d'or et drogues. Ils reviennent de ces voyages avec leurs poches remplies de dollars. Comme Chon a lui-même confessé, les livraisons américaines incluaient des navires agés du temps de la deuxième guerre mondiale qui ont vu au moins 30 ans de service. Souvent ils ont besoin d'être réparés, ce qui bien sûr donne des affaires supplémentaires aux officiers navals.

Le trafic de drogues a réveillé l'opinion publique américaine. Elles ont trouvé leur voie dans les Etats Unis précisément à travers le moyen de ces missions officielles de l'Amirauté.

Vendues par les trafiquants Thai des chalutiers aux navires de la Marine de Saïgon, ou fournies du bas Laos à Saïgon par des vaisseaux remontant le Mekong sur les territoires cambodgiens, les drogues venant du Triangle d'Or (Burma-Thailand-Laos) voyagent tranquillement vers Marseilles, Hong Kong ou New York après avoir passé par Bangkok, Vientiane, Phnom Penh, Pakse, Savannakhet, Rach Soi, etc. Cette fameuse route, organisée et patronnée par Thieu et son Conseiller de Sécurité Dang Van Quang, dépasse de loin la contrebande par air pratiquée par Nguyen Cao Ky. Son bénéfice annuelle atteint un centaine de millions de dollars. Thieu s'est montré judicieux en confiant cette importante affaire à ses amiraux: Chung Tan Cang, son agent fidèle qui a bénéficié de l'aide de secours organisée à l'occasion des inondations de 1965 pour voler les victimes de l'aide qui leur est due; Lam Nguon Tanh, son ancien camarade de classe à l'Ecole de la Marine, un cheval noir dont les activités de contrebande datent du du temps quand il commandait le camp de la rivière Rach Soi-Tan Chau-Long Xuyen; et Tran Van Chon, qui a été un membre de la bande de Thieu pendant ses débaucheries extra-conjugales secrètes à Vung Tau.

L'un des plus grands scandales du régime de Thieu révèle que les trafiquants de drogues sont les mêmes personnes qui sont supposées de supprimer le trafic de drogues. Ainsi Chung Tan Cang, tandis qu'il était chef amiral, était placé dans le poste du Comité National Anti-Drogue du Président, et Vice-Amiral Lam Nguon Tanh devint Président du secteur Naval de ce comité. Tous deux étaient des associés de Nguyen Van Thieu. Leur confier avec la suppression du trafic de drogues simplement équivale à garantir une sécurité absolue à leurs entreprises abominables.

Comme il a été révélé par d'autres généraux fantoches, la Marine servait moins en combat que dans l'accomplissement des missions extra-militaires de ce genre. Les navires étaient constamment en mouvement, transportant des marchandises pour les femmes des amiraux, ou loués leurs services aux commerçants d'une région à une autre. Le transport de riz pour les spéculateurs à Cholon seul leur a apporté des douzaines de millions de piastres annuellement.

Cet advantage naturellement réveille à un ceratin degré la jalousie dans les autres services de l'armée. Les dirigeants de la Marine ont une plus haute longévité, moins de pressions tout en s'enrichant scandaleusement. La mer est considérée comme un terrain de chasse absolument sauf et les régions de rivière sont bien profitables. S'ils voient un village prospère pendant une patrouille, ils n'ont qu'à sonner l'alarme, prétendent un ennemi imaginaire, tirent au hasard, puis pillent le village et filent, bourrés avec du butin à leur gré - bétail, cochons et volailles, motocyclettes, bijoux, or, argent, etc. Ces régions peuvent être choisies à l'avance, et marquées sur la carte même si elles sont connues comme complètement dépourvues de Viet Cong. Quant à ces régions tenues par le FLN, ces pirates tireraient des rafales au hasard, sans se soucier de viser et sans prende la peine de mettre les pieds à terre.

Chaque secteur, chaque port militaire est une réserve de quelque haut placés: sous prétexte de sécurité nationale, ou de secret militaire, il est défendu de se traîner autour des régions du quai. En réalité, elles ne sont pas plus que des dépôts des marchandises importés frauduleusement. Plus les produits sont défendus, plus ils sont en abondance sur ces dépôts. Il est commun aux acolytes de Thieu et de Khiem, quand ils ont besoin des liqueurs d'une brande spéciale pour fêter leurs invités, s'approvisonneraient à travers le canal de l'Amirauté.

Les amiraux, en s'associant avec les commerçants, établissent le monopole de la pêche dans certaines régions, et les droits du traitement des produits maritimes pour approvisionner le marché domestique et les marchés étrangères. Les plus dociles marins sont assignés à travailler dans ces institutions. Quand ils ne sont pas assez dociles, ils sont immédiatement envoyés au front pour une période de combat, la longueur dépend de la sévérité du cas. Comme la Marine rarement s'engage en combat, ces récalcitrants sont la plupart assignés aux unités de parachutistes, commandos ou marines de corps. De toutes ces punitions, les marins ont le plus peur de ce dernier traitement.

Ces spéciaux avantages de la Marine ont incité Tran Van Chon à faire de ces trois fils tous officiers navals, y compris un lieutenant-commandant d'un croiseur - qui adoptent la carrière de leur père.

Les amiraux cependant ne s'étaient pas entièrement satisfaits avec les conditions de leur flotte, que les conseillers américains plaçaient 4ème dans le monde entier. Ils faisaient tout le possible pour obtenir la livraison des vaisseaux de grand tonnage pour augmenter leurs fortunes. La tombée du régime de Saïgon a mis fin à ce rêve d'argent.

Chefs de Province - Poings de Fer dans des Gants de Velours

Rappelant les jours où il était chef de la province de Phuoc Vinh, le Général de Brigade Ho Trung Hau raconte:

"Je fus assigné à Phuoc vinh le 18 septembre 1961, à un moment où la politique de l'Etat des hameaux stratégiques commençait à répandre. De l'iniative de qui je ne sais pas, les cités de Thuong Long, Tan Tich et Dat Quoc ont été razées par le 8ème Régiment de la 5ème Division, et leurs habitants, presque 2 000 femmes, enfants et vieillards, ont été transportés par camions à Phuoc Vinh. Je les mets dans le hameau stratégique de Vinh Hoa, dont la construction a été achevé. Mais ils désertent. J'ai dû les rattraper et employer des moyens forts pour les prévenir de fuir.

"Ma fonction était d'assurer la protection des colonies d'agriculture existantes et d'en ouvrir de nouvelles. Les groupes de maisons éparpillées sont déplacées autour de Phuoc Vinh. Pour la défense de la capitale provinciale, j'ordonne aux bulldozers de razer les forêts d'alentours et fais construire un terrain d'aviation au nord de la ville. La 5ème Division ballaie la région, mais sans résultats signifiants. C'est pourquoi nous devons conduire continuellement des opérations.

"Des avantages substantiels compensent le dur travail inhérent dans la charge d'une province. C'est pourquoi les gens doivent payer pour ce poste, de 500 000 à un million, ou même deux millions de piastres, dépendant des conditions et de l'importance de la province.

Le Van Tu, ün autre Général de Brigade, était successivement Chef de Province de Phong Dinh, Hau Nghia, Go Cong et Long An. Selon lui, "les avantages de chef d'une province surpassent de loin ceux de commandant d'un régiment ou même d'une division, car il a toute une région sous son contrôle.

"Il explique, comme ses anciens collègues: "Le Chef de Province combine toutes les fonctions d'un commandant du secteur militaire. Il contrôle toutes les affaires administratives et militaires. Il est un vrai seigneur investi du pouvoir, y compris celui de promulguer des décrets applicable dans la province sous sa juridiction. Il prend avantage de ceci pour tenir la population en chantage.

"Il décide le budget provincial; et propose la somme d'aide militaire et civile américaine pour la province. Il reçoit beaucoup de matériaux pour la construction des hameaux stratégiques et des installations militaires. Il peut les misapproprier pour construire ses propres villas, ou même les vendre aux entrepreneurs. Pas de contrôle soit possible à cause de l'état de guerre.

"Pas comme un commandant d'une unité militaire, il conduit une vie sédentaire de confort. La plupart d'entre eux vivent dans des vieux palais des administrateurs français, rénovés avec des matériaux et des gadgets fournis par les Américains. Certains de ces palais ont même des piscines et des jardins de cerfs. Au temps où Vinh Loc gouverne les Hauts-Plateaux du Centre, il arrange ses bureaux et sa résidence selon le modèle des courts royaux. De temps en temps il défile sur le dos d'un éléphant richement harnaché.

"Les commandants d'unité peuvent bien sûr faire de l'argent en falsifiant les déclarations des effectifs: morts et déserteurs figurés sur le registre du personnel après la disparition. Mais les unités régulières doivent remplacer leurs pertes chaque fois qu'elles retournent d'une opération et faire la vérification des effectifs, ce qui fait que la tricherie ne peut pas continuer indéfinivement. Par contre, le chef de province a un millier de façons de cacher la vérité au sujet des effectifs. Tout d'abord, les hommes tués séparément au cours d'un raid ne sont jamais mis sur la liste des morts. Plus long ils sont rapportés comme vivants, plus grand est le crédit donné à l'administrateur et plus de points accordés au fonctionnaire. En second lieu, le chef de province confère ses faveurs sur les hommes militaires qui sont plus riches, les permettant de vivre à la maison et seulement de se présenter quand appelé à le faire ainsi. A part des paiements substantiels, le chef de province empoche les salaires des soldats quand ils sont absents. En dernier lieu, chaque fois que les soldats des forces régionales sont envoyés pour remplir les unités régulières, les fils des familles riches sont invariablement choisis. Comme ses garçons ont peur d'aller au front ils doivent payer d'énorme somme au chef de province pour obtenir l'exemption.

"En plus de cela, le chef de province signe les autorisations de commerce, les visas d'entrée et de sortie pour les marchandises, délivre les permis pour ouvrir les boutiques, restaurants, bordels, casinos et autres entreprises. Aux pot-au-vins sont ajoutés les paiements pour les bénéfices reçues. Si la somme est considérée insuffisante, le chef de province peut fermer l'affaire et plus tard la donne à quelqu'un d'autre qui est plus docile. Au-dessus de tout, il réserve à sa femme les affaires les plus lucratives.

"Le chef de province peut faire arrêter les gens, les faire emprisonner, les battre et les faire torturer à son gré. Il suffit qu'un homme soit soupçonné d'être un Viet Cong pour que toutes sortes de malheurs tombent sur sa famille. Tout ce qu'il puisse faire alors est de soudoyer le chef de province, afin d'en sortir des ennuis."

"Les généraux de l'armée fantoche arrivent finalement à la conclusion suivante: le district est à un niveau trop bas pour de vraies grandes affaires; les régions militaires, bien que très enviables, présentent trop de compétition car elles ne sont que quatre régions. Par contre, le niveau intermédiaire, la province, amène de bonnes affaires. Beaucoup de généraux ont fait fortune en tant que chef de province. Le seul problème est que leur pouvoir est proportionné à la somme des pourboires qu'ils paient chaque mois au commandant de la région militaire, et à Thieu lui-même.

Le zèle qu'a montré le Général Le Van Tu dans toutes les quatre provinces où il avait opéré, se montrant lui-même dans les raids répétés, construisant des hameaux stratégiques, rassemblant la population, sa présence aux plus chauds points des campagnes militaires, les efforts supplémentaires à long terme et accélérés de la pacification, a échoué de le sauver des reculs dans sa carrière, à cause de l'insuffisance des pourboires qu'il offre à ses supérieurs. En 1962, Tu a été licensié en tant que chef de province de Phong Dinh quand il était dans la cité de Cam Tho. En 1965, il a été de nouveau congédié en tant que chef de province de Hau Nghia. Il a été plus tard promu au rang de général de brigade seulement pour être finalement imprisonné pour compte de "corruption, abus de confiance, détournement de carburant, et falsification de papiers d'effectifs fantômes."

Vietnam Courier #51 (Août 1976)
Courtoisie d'Adam Sadowski