Deuxième Énonciation

(Cette lettre a été envoyée par le Colonel Ta Thanh Long, dans laquelle il récuse l'affirmation que le Général Hieu est mort à midi comme l'a soutenu son collègue Khuyên dans la 1ère " énonciation " . Je soumets cette lettre, en toute impartialité, à l'appréciation du public.)

Le 4 Janvier 1999.

Cher Monsieur Nguyen Van Tin,

Poursuivant notre conversation téléphonique du 2 Janvier 1999 à 8h du matin, je confirme que la mort du Général Hieu est survenu après la réunion de récapitulation des opérations qui a eu lieu tous les soirs (vers 18h30) et pas à midi comme ont prétendu certaines rumeurs. En voici les faits:

J'avais, en tant que Chef de la Délégation Vietnamienne, membre du Comité Militaire de quadripartite - bilatéral, le devoir d'assister à la réunion au quartier général (QG) du 3ème Corps d'armée (CA) chaque soir à 17h pour y prendre notes et ensuite transférer le rapport au comité international concernant des violations des Communistes assujetti à l'Accord de Paris.

Ce soir-là, j'assiste à la séance présidée par le Général Hieu. J'apprends que le Général Toan, le Commandant en chef, était occupé à l'Avant Poste de Commandement basé à Go Dau Ha, Tay Ninh. Hieu s'assoie au milieu, à sa gauche: le Général Dao Duy An, Chef d'Etat Major (EM) et le Colonel Phan Huy Luong, l'adjoint d'E M/Opérations. À sa droite: Monsieur Peters, le Consul Général Américain de Bien Hoa et moi. Le dernier rang est occupé par les Officiers de l'E M.

Après cette rencontre, les Généraux Hieu, An et moi entrons dans la salle de réceptions pour boire du thé. Hieu me dit en la présence de An: "Ma collection de pistolets a atteint le numéro 37, je viens d'obtenir un P.38, et fait renouveler les rayures par l'Unité d'Equipements, laissez-moi aller le chercher pour vous le montrer." À ce moment-là, le Colonel Luong entre dans la salle et invite Hieu à aller dîner. An et moi nous nous levons pour nous retirer.

Ma voiture m'amène à l'Hôtel de la Piscine, à Bien Hoa (le bureau du Comité International), j'y reste quelques 20 minutes pour briefer le Colonel Président au sujet des violations commises par les Communistes. Après quoi, je retourne chez moi. À peine arrivée à mon bureau (encore assis dans ma voiture), mon adjoint, le Lieutenant Colonel Nguyen Van Thang, me rapporte: "le Colonel Luong a besoin de vous voir tout de suite, le Général Hieu vient de mourir."

Je retourne au QG du 3ème CA et vois la Police Militaire barrer toute entrée et sortie. Je demande à Luong: "Que s'est-il passé?" ce dernier répond: "Après le dîner, le Général Hieu retourne à son cabinet de travail, quelques minutes après on entend un coup de feu, les gardes entrent en premier à l'intérieur et voient leur chef, couvert de sang, vautré à sa table, et donnent l'alerte. Je vous invite à venir témoigner afin que l'autorité puisse faire l'enquête, parce que vous et le Général Hieu êtes de la même promotion et que de nous tous, vous êtes le plus proche de lui."

Cher Monsieur,

Avec mon écriture et ma signature, aussi bien que mon témoignage, je souhaite que vous écriviez de nouveau et avec exactitude "le parcours et la vie" de votre frère qui était aussi l'un de mes très chers amis."

Commentaires

1. Je prends note de la divergence temporelle entre le témoignage du Colonel Nguyen Khuyen et celui du Colonel Ta Thanh Long: à 12h30 et à 18h30. Lequel des deux s'en souvient avec plus d'exactitude? Leur controverse devrait être vérifiée avec d'autres témoins. Khuyen assistait au Comité d'Anticorruption mensuellement; Long participait à sa réunion quotidienne à 17h; Qui des deux aurait le plus de chance de se tromper ?

2. Le Général Ly Tong Ba a affirmé qu'il était dans une réunion avec le Général Toan au QG du 3ème CA, et non pas à l'Avant-poste de Commandement à Go Dau Ha comme l' a dit le Colonel Long. Le Général Ba affirme qu'après cette rencontre, il entendait en passant près du bureau du Général Hieu la rumeur provenait des soldats et selon laquelle ce dernier avait été tué dans son cabinet de travail.

3. Jusqu'aujourd'hui, le Général Hieu est prétendu mort avant le déjeuner ou le dîner. Cette lettre affirme que le Général Hieu est mort après le dîner.

4. Auparavant, c'était Hieu qui invitait le Colonel Luong au mess des officiers. Cette lettre affirme que c'était l'inverse.

5. Jusqu'aujourd'hui, le pistolet en question a été dit avoir été envoyé pour fixer le dispositif de sécurité. Cette lettre affirme qu'il a été envoyé pour renouveler les rayures.

6. Luong était le premier à être présent sur le lieu du meurtre, tout de suite après avoir entendu le coup de feu. Cette lettre affirme que c'était les gardes qui ont été les premiers arrivants dans le bureau et ensuite ont donné l'alerte.

7. En plus, j'ai obtenu d'autres détails suivants:

a. Le 8 Avril 1975, un groupe de soldats en tenu de combat commandé par le Général Le Trung Tuong arriva au QG du 3ème CA et fit partir les gardes de la Police Militaire. Le mois précédent, ce Général a lâchement abandonné son commandement de la 23ème DI devant l'offensive des troupes Communistes à Ban Me Thuot. Au moment où Hieu a été tué, il n'y avait aucun garde aux alentours de son bureau.

b. Le Lieutenant Colonel Vinh Ho, l'ex- officier de renseignement du 2ème CA du Général Toan, était venu rendre visite à ce dernier après que les unités du 2ème CA ont été démantelées. Tandis qu'il attendait d'être reçu, il a entendu deux coups de feu, et non pas un seul, venant du bureau de Hieu, puis il a également entendu le bruit de nombreux pas. (J'ai entendu dire que le Lieutenant Colonel Vinh Ho est déjà décédé, victime d'un cancer).

c. Le pistolet que le Général Hieu a soi-disant tenu dans sa main était de modèle antique d'un poids très lourd, de marque française utilisé naguère par les officiers de la Légion Etrangère. Parce qu'il pèse plus lourd que d'autres, Hieu ne le portait pas sur lui, il le laissait plutôt dans son cabinet.

d. Un Colonel, qui a travaillé dans la Sécurité Militaire, a révélé: l'arme dont l'assassin s'est servi aurait dû être un pistolet doté d' un dispositif silencieux de type très rare ; les Américains l'ont fourni à un nombre restreint d'unités de forces spéciales. Par conséquent, le comité d'enquête n'aurait pas de difficulté particulière de découvrir sa provenance, si il le souhaitait.

e. Un Capitaine des Forces Spéciales a suggéré que le pistolet qui a tué le Général Hieu était un Browning, de type petit, couvrant 3/4 de la paume de main, sans dispositif silencieux, utilisant des balles de 8 mm. La personne qui utilise ce genre de pistolet, afin de subjuguer sa victime, a l'habitude de presser le pistolet contre le côté gauche du menton de celle ci. Si la victime se tient immobile, la balle pénètre au côté gauche du menton et sort par derrière le cou. Si celle ci rejette sa tête vers l'arrière et à droite (dans le cas de Hieu), la balle sort au côté droit du sommet de la tête.

f. Le jour suivant, le Général Cao Hao Hon s'était présenté au lieu du meurtre, envoyé par le Président Thieu.

g. Le 10 Avril 1975, un Capitaine, parent de la famille, vient au QG pour se recueillir devant le corps de Hieu. Les " Toanistes " sont omniprésents aux alentours. Le père du défunt est aussi présent. Il demande à haute voix au nouveau venu: "un pistolet à rouleau ne pourrait pas se décharger aussi facilement, n'est-ce pas?" Notre Capitaine répond craintivement à voix basse: "Oui, mon oncle." À ce moment-là, il remarque du coin de l'œil, d'innombrables paires d'yeux les observent. À son départ, il est conscient que derrière son Vespa, deux officiers le poursuivent dans une jeep. Il a dû se tergiverser dans les dédales des ruelles afin de les semer... S'il n'y avait pas de complot, il ne serait pas nécessaire de recourir à une telle surveillance.

8. Dans une conversation téléphonique après la réception de la lettre citée ci-dessus, le Colonel Luong reconnaît: "En toute honnêteté, je dois admettre qu'il est presque impossible que le pistolet P.38 se décharge de lui-même. Afin de l'armer, on doit appliquer deux actions consécutives: 1. enlever le cran de sécurité, et 2. appuyer sur la détente."

9. J'accepte volontiers tous les faits et les détails concernant la mort du Général Hieu, avec l'espoir que l'examen approfondi de ceux-ci permettra de découvrir une conclusion véridique.

10. Le Colonel Long a ajouté le 20 Janvier 1999: "Dans cette perte tragique, causée par un acte de malveillance ou par négligence, la lumière s'éclaircira."


Nguyen Van Tin
24 Janvier 1999

Mis à jour le 29.08.1999
Révisé le 18.12.2003

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