Hieu Désigne Lui-même son Chef de Commandos

Durant presque un mois, l'unité est mise en quarantaine. Non pas pour raison militaire, mais à cause de la mort de son chef, le lieutenant Au Hoang Minh. Il a été abattu par un lieutenant des Forces Spéciales sur la piste de danse du cabaret Clair de Lune à Qui Nhon. Sa disparition a stupéfié tout le monde. Le sous-lieutenant Duc, alias « Duc à la Moustache de plombe », son adjoint, a juré de le venger. La bataille, au lieu de se dérouler au front, se passe maintenant à l'arrière. Les unités de La Prévôté Vietnamienne et Américaine patrouillent incessamment. Les unités des Forces Spéciales et celles des commandos sont mises à la consigne avec l’interdiction formelle d’entrer en ville. Le Lieutenant Minh était un combattant formidable et aguerri de la 22ème Division d'Infanterie (DI). Il était d’origine Parachutistes.

Sa mort met toute la ville en émoi. On évoque souvent l'attitude cavalière, arrogante et querelleuse de certains chefs d’unités d’élites. A chaque arrivée en ville, ils se font entourés par une horde de gardes du corps armés jusqu'aux dents. Leurs entrées dans les cabarets provoquent la panique, et tout le monde les évite. Et ce qui devrai arriver arriva : un groupe en défie un autre ; ensuite des coups de feu éclatent, et enfin la bataille rangée. Un vrai western.

La disparition du commandant de la 405ème Compagnie de Commandos incombe au Commandant de la 22ème DI, le Général Nguyen Van Hieu, la tâche de sélectionner un successeur digne de ce nom. En tant que commandant d’une division comportant trois régiments, avec la mission de couvrir tous les territoires des subdivisions de Binh Dinh, Phu Yen, Phu Bon, Pleiku, Kontum, ordinairement, cette tâche n’est pas la sienne. Et pourtant il a mis tout son coeur dans cette affaire.

La réputation des Commandos n’est plus un secret pour personne depuis que l'Etat Major Général a créé les six unités autonomes pour répondre aux besoins particuliers de la lutte montagnarde. Initialement, la majorité de ses troupes sont composée de guerriers provenant des tribus Nung (les montagnards du Nord), renforcées par des montagnards du centre et des vietnamiens (les Kinh). Ils forment une entité à part; opèrent des missions de reconnaissance et exécutent des raids éclairs. Ils ne portent pas des casques mais des chapeaux feutrés, et n’utilisent que de l’armement léger. Ils sont fiers de leur esprit combatif comme l'attestent leurs nombreux raids foudroyants au sein des sanctuaires ennemis de Tam Bien, détruisant entièrement leurs bases arrières ; ou encore de leurs secours portées aux unités amies encerclées. Leur tâche principale est celle d'une unité de réserve et de la protection du quartier général (QG) de la 22ème DI. Durant le commandement du général Hieu, ils ont assuré si bien leur mission qu’aucun obus n’a pu atteindre le périmètre du QG divisionnaire.

Celui-ci comprenait leur frustration causée par la mort de leur chef, et par contrecoup, la discipline s’amenuisait de jour en jour. Il ne voulait pas que cette unité continuait à sombrer dans la carence. Mais comment faire pour déceler un nouveau leader capable de les commander efficacement et en même temps les contenir contre leur soif de vengeance? Un chef possédant de l’esprit d’équipe, de la maîtrise de soi en toute circonstance et dépourvu d’arrogance et de bellicisme?

Un matin, il remarqua un jeune lieutenant arborant l'insigne de parachutiste à la poitrine. C'était l'officier de liaison de l'air du Centre Opérationnel. Il reconnaissait en ce dernier de la sérénité, de la connaissance en stratégie, de l’expérience en tactique, et de la maîtrise en langue étrangère capable de soutenir brillamment un briefing en Anglais. Ce dernier trait lui procurait de la fierté vis-à-vis du conseiller Américain. Il ordonna discrètement au 1er bureau de lui présenter son état de services. On lui fit savoir que ce dernier est issu de la 18ème promotion de Dalat et avait été recalé du corps parachutiste. Il se nomme Nguyen dinh Tra et sous l’autorité duquel j'ai eu le privilège de servir pendant presque quatre ans et demi jusqu'au jour où il devint capitaine, ensuite commandant d'un bataillon.

Tran Hoai Thu
Octobre 1999

Révisé le 02.06.2004

generalhieu